Quelle que soit l’entreprise, l’employeur a l’obligation de veiller à la santé et à la sécurité de ses travailleurs en mettant en place des actions de prévention, d’information et de formation (article 4121-1 du Code du travail). Il s’agit d’une obligation de résultat qui peut engager sa responsabilité civile et pénale et / ou administrative.

Pour autant, de nombreux progrès sont encore à réaliser pour mieux préserver la santé au travail. Le 31 mars 2022, une loi visant à renforcer la prévention en santé au travail est entrée en vigueur. SeedWork vous propose de faire un bilan : où en êtes-vous dans la mise en œuvre des nouveautés de cette loi ?

Au fait, la loi sur la santé au travail, kesako ?

La loi transposant l’accord national interprofessionnel (ANI) conclu le 10 décembre 2020 par les partenaires sociaux pour une réforme de la santé  liée à l’activité professionnelle a été publiée au Journal officiel du 3 août 2021 (légifrance)

Parmi les objectifs de cette loi : favoriser la prévention primaire et mettre l’accent sur certains risques insuffisamment pris en compte.

On y retrouve plusieurs dispositions telles que la prévention de la désinsertion professionnelle, des réformes du Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP), une réforme des visites médicales, une extension de la définition du harcèlement sexuel, la mise en place d’un passeport prévention et de nouvelles obligations de formation à la santé et la sécurité, …

Pour ne pas tomber dans une liste à la Prévert de toutes les nouveautés, soulignons d’abord deux grandes intentions de cette loi, que SeedWork trouve essentielles, et qui sont des principes structurants pour toute entreprise donnant du sens à ces nouvelles obligations :

1. Renforcer la prévention primaire

C’est quoi la prévention primaire ? C’est combattre le risque à la source. Elle consiste en une approche de prévention qui est centrée sur le travail et son organisation et elle renvoie à une prévention collective des risques.

Elle est indispensable à l’employeur afin d’agir efficacement et durablement et pour répondre à son obligation de résultat de santé et sécurité.

Les autres niveaux de prévention permettent de protéger (prévention secondaire) ou de réparer (prévention tertiaire). Ils sont nécessaires mais pas suffisants.

Loi santé travail : Les 3 niveaux de prevention

La nouvelle loi vise à renforcer le volet primaire de la prévention, qui est encore trop peu développé dans les entreprises à ce jour, via plusieurs outils (le DUERP, la formation des élus du CSE, etc.).

D’ailleurs, un changement incitatif de cette nouvelle loi est la négociation sur la qualité des conditions de travail. C’est désormais un thème possible à évoquer lors de la négociation annuelle. Cette dernière s’intitulera « Négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, la qualité de vie et des conditions de travail ».

2. Mieux prévenir la désinsertion professionnelle

Certains salariés peuvent être vulnérables du fait d’un état de santé difficilement compatible avec la poursuite de leur activité, que cela soit d’origine professionnelle ou non. Le contexte de vieillissement des actifs, d’allongement de la vie professionnelle mais également l’augmentation des maladies chroniques renforcent ces risques.

La prévention de la désinsertion professionnelle (PDP), consiste à tenir compte de ces situations de vulnérabilité dans les parcours des salariés et à mettre en place des dispositifs d’accompagnement pour prévenir les risques de ruptures. Pour en savoir plus sur la PDP c’est par ici !

Plusieurs mesures de la nouvelle loi visent à mieux prévenir ce risque, avec notamment la réforme des visites médicales et le renforcement de la prévention.

Concrètement, les nouvelles obligations à mettre en place

Quelles sont les nouvelles mesures pour répondre concrètement à ces grandes intentions de prévention primaire et de prévention de la désinsertion professionnelle ?

1. Un renforcement du Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP)

Le nouvel article L4121-3-1 du Code du travail vise à renforcer l’existence, l’importance et le contenu du DUERP.

L’article ne prévoit plus de mise à jour obligatoire annuelle pour les entreprises de moins de 11 salariés. Mais elle sera nécessaire lors de toute décision impactant les conditions de travail. Quant aux entreprises de moins de 50 salariés, la mise à jour du DUERP et de la liste des actions de prévention doit être simultanée.

Enfin, pour les entreprises de plus de 50 salariés, les résultats de l’évaluation des risques doivent déboucher sur un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT), à actualiser si nécessaire lors de chaque mise à jour du DUERP.

L’article prévoit également que l’employeur doit désormais :

  • Tenir compte des polyexpositions aux risques pour les salariés exposés aux agents chimiques avec effets combinés
  • Evaluer les risques non seulement sur les postes de travail mais également de façon plus transversale sur l’organisation du travail (comme par exemple avec la mise en place du télétravail)
  • Conserver le DUERP, dans ses versions successives, pendant une durée d’au moins 40 ans. Il a l’obligation de tenir ce document à la disposition des travailleurs et des anciens employés. Enfin, pour garantir cette conservation, la loi prévoit un archivage dématérialisé du DUERP.

À noter : Le rôle du CSE est renforcé, car non seulement il doit impérativement être consulté y compris sur les mises à jour du DUERP, mais il peut être également associé à sa construction.

2. Un suivi médical développé

Parmi les nouveautés de la loi, on peut souligner :

  • La création du rendez-vous de liaison : non obligatoire et non médical, pour les salariés en arrêt de plus de 30 jours (professionnels ou non). L’objectif du rendez-vous de liaison est d’informer le salarié qu’il peut bénéficier d’actions de prévention et de formation, d’un examen de pré-reprise et de mesures d’aménagements de son poste .
  • L’évolution du délai d’absence pour le déclenchement de la visite de pré-reprise : 30 jours au lieu de 3 mois
  • L’évolution du délai d’absence pour les visites de reprise pour les absences non professionnelles à 60 jours (il reste à 30 jours suite à un AT et sans délai pour une maladie professionnelle). Attention il vous reste toujours 8 jours pour les organiser !
  • La mise en place d’une visite de mi-carrière organisée l’année civile des 45 ans du salarié (sauf accord de branche). Cette visite a pour objectif de renforcer la prévention de la santé au travail en prenant en compte l’âge et l’état de santé du salarié. Le médecin du travail peut proposer des aménagements de poste ou d’horaires à l’issue de cette visite.
  • La mise en place de la visite médicale de fin de carrière pour les salariés ayant fait l’objet d’un suivi individuel renforcé ou ayant été exposés à certains risques avant 2017 : un état des lieux des expositions du salarié aux divers risques de sa profession pourra être dressé à cette occasion.

3. Une meilleure prévention du harcèlement sexuel

loi santé : égalité pro simple

La loi santé étend la définition du harcèlement sexuel du code du travail :

  • « aux propos et comportements à connotation sexiste ;
  • aux propos et comportements à connotation sexuelle ou sexiste venant de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
  • à de tels propos ou comportements, successivement, venant de plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition. »

Le harcèlement sexuel au travail est constitué lorsqu’il est subi par le salarié et non pas lorsqu’il est imposé par l’auteur ou les auteurs (il n’y a pas, contrairement au code pénal, d’intentionnalité requise).

Aussi, l’employeur a pour obligation de mettre en œuvre son règlement intérieur et il lui est recommandé de mettre en place des actions de prévention pour sensibiliser et former les salariés et de désigner des référents harcèlement sexuel et agissements sexistes parmi les élus du Comité social et économique (CSE) ou parmi les salariés.

4. Une meilleure formation en santé sécurité et conditions de travail (SSCT)

La loi santé  travail prévoit également la création d’un passeport de prévention afin de recenser toutes les qualifications acquises par un salarié lors de formations sur la santé et la sécurité sur le lieu d’activité professionnelle.

Cette loi augmente également le nombre de jours de formation en santé sécurité et conditions de travail (SSCT) des élus du CSE, comme détaillé ci-dessous :

  • Lors du premier mandat : 5 jours minimum de formation SSCT
  • En cas de renouvellement : 3 jours pour chaque membre de la délégation du personnel et 5 jours pour les membres de la commission SSCT dans les entreprises de plus de 300 salariés.

De plus, la formation du référent santé et sécurité au travail devient obligatoire. Pour rappel, l’employeur a l’obligation de désigner un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise.

Tic Tac Tic Tac… Vous en êtes où ?

La majorité des mesures de la loi doit être appliquée depuis avril 2022, et le 1er octobre 2022 pour le passeport de prévention.​ Et vous, qu’avez-vous initié dans votre entreprise à ce sujet ? Pas encore d’actions mises en place ? Il n’est jamais trop tard.

Vous souhaitez en savoir davantage sur la loi santé ou cherchez à être accompagné pour renforcer la prévention primaire dans votre entreprise, prévenir le sexisme, ou la désinsertion professionnelle ?

SeedWork vous accompagne dans votre démarche de prévention des risques, via des missions de conseil et des formations. Des animations sur la prévention du sexisme peuvent également être réalisées.